Prix du plastique : les prévisions pour 2023

23 décembre 2022 Dernière mise à jour : 23 décembre 2022
2020 et 2021 auront été deux années noires pour les plasturgistes français et européens. 2022 s’est elle aussi accompagnée de nombreux rebondissements, et tous n’ont pas été négatifs ! Il s’agit toutefois d’une énième année difficile pour la filière, marquée par une incertitude grandissante et une complexification notable des différents marchés des polymères.
Tendances de prix du plastique en 2022

Le service Performance économique prédisait en 2022 que « les prix du plastique vont continuer à augmenter, ou au moins se maintenir à des niveaux très élevés ». Force est de constater que ces prévisions se sont avérées justes, puisque la hausse des prix du plastique a perduré jusqu’à la fin du premier semestre 2022, et que les niveaux de prix actuels sont encore loin d’approcher ceux de 2019. Pourtant, les cartes du marché européen des polymères ont été rebattues depuis la publication de l’article des prévisions de 2022.

Le service Performance économique de Polyvia vous propose donc un tour d’horizon des événements qui ont marqué les marchés européens des polymères en 2022 et qui les influencent encore aujourd’hui. Cette étape est en effet indispensable pour comprendre les prévisions de prix du plastique du service, qui vous proposera également plusieurs points de vigilance à bien garder à l’esprit pour pouvoir naviguer une année 2023 qui, elle aussi, s’annonce difficile.

L’exercice de prévision de l’évolution des prix du plastique s’avérant par ailleurs de plus en plus délicat, le service Performance économique prévoit de mettre à jour ses prévisions au plus tard à la fin du 1er semestre 2023.

Les événements qui ont influencé les prix du plastique en 2022

L’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février sur ordre de Vladimir Poutine a sombrement marqué l’année 2022. Les souffrances humaines découlant directement de ce conflit sont indéniables et largement dénoncées. Les conséquences de cette guerre, qui déstabilise l’Europe car survenue dans son cœur, demeurent encore incertaines puisqu’elle n’est pas terminée.

Cet événement majeur de l’histoire européenne a toutefois eu d’importantes ramifications géopolitiques, notamment une nuée de sanctions à l’encontre de la Russie, pour certaines jamais vues jusqu’ici. La guerre en Ukraine remet également en question la souveraineté énergétique de l’Europe, un fait qui a lourdement pesé sur l’industrie de la chimie tout au long de l’année.

Guerre en Ukraine : panique sur les marchés de l’énergie… et du plastique !

D’un problème inquiétant, la dépendance historique de l’Europe au gaz naturel, et plus particulièrement au gaz naturel russe, s’est transformée en problématique destructrice dès lors que la Russie a envahi l’Ukraine. Seulement deux pays européens n’utilisaient pas le gaz dans leur mix énergétique avant que le conflit n’éclate, si bien qu’un tiers de l’énergie consommée en Europe découlaient directement du gaz en 2021, selon Al Jazeera. L’hiver est désormais là, et l’Europe se retrouve dans une situation précaire.

Graphique : Mix énergétique de l'Europe en 2021

Source : Al Jazeera, d’après les données du rapport « Statistical Review of World Energy » de BP
Mix énergétique de l'Europe

Les prix spot de l’électricité en France étaient 6 fois plus élevés au début du mois de décembre 2022 qu’en janvier 2019. Au regard des graphiques présentés ci-dessous, on constat qu’un pic particulièrement violent a été atteint le 26 août 2022.

Graphiques : Cours spot de l’électricité en France et en Allemagne sur un an 

Source : Trading Economics, données prélevées le 23/12/2022.

Cours spot de l'électricité en France en 2022
Cours spot de l'électricité en Allemagneen 2022

La Russie annonçait le 26 août 2022 son intention d’arrêter les flux commerciaux de gaz naturel vers l’Europe. La fermeture de Nord Stream 1 a par ailleurs été officialisée le 31 août 2022.

Cette annonce s’est traduit par l’explosion des prix spot de l’électricité dans plusieurs pays européens, mais également par un pic des prix contrat. Ceux-ci ont par exemple atteint 995€/MWh en Allemagne et 1100€/MWh en France. Cela s’explique par le fait qu’un cinquième de l’électricité produite en Europe est générée par des centrales à gaz. Un pic similaire a d’ailleurs pu être observé pour le gaz naturel en Europe.

Graphique : Evolution du cours TTF du gaz naturel (référence en Europe) sur un an

Source : Trading Economics, données prélevées le 23/12/2022.

Evolution de l'indice européen de référence TTF pour le gaz naturel en Europe en 2022

La crise actuelle de l’énergie est particulièrement problématique pour la pétrochimie, et plus largement la chimie, européennes. Si l’on en croit les données publiées par Cefic (organisation représentant les chimistes européens) en 2022, l’industrie chimique représentait 21,2% - soit 50,8 millions de tonnes d’équivalent pétrole - de l’énergie consommée par l’industrie en Europe en 2019.  

Plus d’un tiers de l’énergie consommée par la chimie européenne serait en fait du gaz. Cela représentait 22,5% de la consommation de l’industrie dans son ensemble en 2019. L’électricité représente quant à elle 28,1% de l’énergie consommée par l’industrie chimique européenne, soit 17,8% de la consommation d’électricité de l’industrie en général en 2019. La chimie serait ainsi l’industrie consommant le plus d’électricité en Europe.

La filière pétrochimique est d’autant plus impactée que, selon l’organisation Petrochemicals Europe, 80% de ses coûts de production seraient directement liés au cours du pétrole et du gaz. Sans surprise, les producteurs de polymères ont cherché à reporter cette hausse des coûts de production sur leurs clients.

Prix du plastique : 2022, l’ère des « surcharges énergétiques »

« Surcharges énergétiques », de quoi s’agit-il au juste ? Mentionnées pour la première fois entre octobre et novembre 2021, les « surcharges énergétiques » seraient en fait des hausses appliquées par les fournisseurs aux prix du plastique. Ces hausses correspondraient au report de l’augmentation des coûts de production liés à l’énergie.

Le montant de ces surcharges a largement varié en fonction des matériaux, mais aussi des producteurs. Plusieurs adhérents de Polyvia ont en effet remarqué que « chacun y va de sa formule ». La plupart des fournisseurs ont également annoncé la possibilité de les renouveler mensuellement, en faisant évoluer leur montant en fonction des variations des cours de l’énergie. Ces surcharges peuvent également s’appliquer en plus des hausses suscitées par l’évolution des cours de monomères.

Le service de Polyvia a étudié ce phénomène dans le cadre de la préparation du Webinaire « 30 minutes pour décrypter les surcharges énergétiques ». Le replay et le support de ce webinaire sont disponibles à la demande pour les adhérents du syndicat.

Il en ressort que le montant moyen des « surcharges énergétiques » cumulées entre octobre 2021 et avril 2022 a atteint 820€/tonne pour les résines polyesters et 746€/tonne pour les résines vinylesters. Et c’est sans compter le report des augmentations du prix des matières premières qui ont également pu s’appliquer aux matériaux composites !

Le montant moyen des « surcharges énergétiques » cumulées sur la même période pour les PE et les PP s’est élevé à 300€/tonne. Les montants ont été bien plus importants pour le PMMA et l'EVOH : respectivement 725€/tonne et 1100€/tonne en moyenne pour la période étudiée !

Conscientes du problème que ces « surcharges énergétiques représentaient pour les plasturgistes, les équipes Affaires publiques et Performance économique ont lancé une enquête flash sur le sujet entre mars et avril 2022. Retour sur les résultats.

 

Matériau

Montant moyen des surcharges énergétiques en avril 2022 (surcharge mensuelle)

Montant moyen des surcharges énergétiques en octobre 2021 (surcharge mensuelle)

PE

120€/tonne

70€/tonne

PP

188€/tonne

123€/tonne

PVC

420€/tonne

240€/tonne

PET

150€/tonne

160€/tonne

PS

240€/tonne

240€/tonne

Matières plastiques recyclées

200€/tonne

213€/tonne

ABS

400€/tonne

408€/tonne

PA

190€/tonne

267€/tonne

PC

110€/tonne

485€/tonne

POM

200€/tonne

323€/tonne

PMMA

275€/tonne

350€/tonne

L’apaisement récent des cours européens du gaz et de l’électricité est plutôt de bon augure pour les plasturgistes, mais certains adhérents ont toutefois fait savoir à Polyvia que certains de leurs fournisseurs continuent de leur imposer des « surcharges énergétiques ». Dans certains cas, l’application de surcharges énergétiques a même été négociée dans le cadre des contrats d’achat de polymères en 2023.

Prix du plastique : changement de comportement des fournisseurs

L’adoption généralisée des « surcharges énergétiques » par les fournisseurs européens de polymères n’a malheureusement pas été l’unique première historique du secteur en 2022. Le mois de mars s’est en effet accompagné d’une rumeur particulièrement inquiétante : les producteurs et acheteurs auraient en effet cherché à renégocier en cours de mois les contrats sur l’éthylène. Du jamais vu.

Le cours contrat de l’éthylène avait en effet augmenté de 95€/tonne début mars, mais cette hausse n’aurait pas été suffisante pour couvrir la hausse des coûts de production liés à l’énergie. Si la rumeur n’a jamais été véritablement confirmée, plusieurs sources expertes du sujet ont fait savoir que ces négociations étaient finalement tombées à l’eau. Dans tous les cas, les fournisseurs de polyoléfines (PE et PP) ont fermé leurs carnets de commande dès la première quinzaine du mois, potentiellement pour ne pas avoir à absorber une nouvelle hausse du cours de l’éthylène…

Au-delà des spéculations quant à la renégociation des contrats sur l’éthylène en cours de mois, d’autres aspects du comportement des fournisseurs européens de polymères ont changé en 2022. Plusieurs adhérents de Polyvia ont en effet témoigné de demandes d’indexation des contrats – en cours d’année ! – sur un indice supplémentaire, cette fois-ci sur l’énergie. D’autres industriels ont fait savoir que leurs fournisseurs cherchaient à rompre les contrats existants pour pouvoir imposer des surcharges énergétiques. On a aussi pu constater des « surcharges énergétiques » appliquées de façon rétroactive.

On peut plus largement supposer que les tactiques de rupture des contrats visaient à permettre à certains fournisseurs de diminuer les volumes annuels de production pour lesquels ils s’étaient préalablement engagés. Une réduction des volumes de production annuels leur permettant alors de préserver une partie de leur marge en réduisant leur exposition aux variations des cours de l’énergie.

Prix du plastique : réductions de production à l’horizon

Il semblerait toutefois que les éventuelles ruptures de contrat et les « surcharges énergétiques » encore appliquées ne permettent pas aux fournisseurs européens de monomères et de polymères d’échapper à la hausse de leurs coûts de production car, contrairement à 2020 et 2021, les conditions du marché ne jouent plus en leur faveur.

Les producteurs européens de polymères doivent en effet composer avec l’effondrement de la demande. Plusieurs secteurs de la plasturgie connaissent un fort ralentissement de leur activité, et les industriels ont donc tendance à commander moins de matériaux. A cela s’ajoute le fait que les niveaux de prix sont toujours très élevés pour la plupart des polymères malgré les récentes baisses de prix, ce qui n’encourage pas les plasturgistes à renflouer leurs stocks.

Graphiques : Evolution des prix du plastique (PE, PP, PVC, PA) entre septembre 2021 et octobre 2022 en €/tonne

Source : Enquête Baromètre des Matières Plastiques de Polyvia

Prix du plastique : évolution du prix du PE
Evolution des prix du PA en 2022

Il est par ailleurs probable que la demande ne redémarre pas de sitôt pour certains secteurs clés de la plasturgie. C’est par exemple le cas de la sous-traitance automobile. Pour d’autres, l’effacement de la demande est en principe saisonnier, comme le bâtiment, certains segments de l’emballage ou encore l’électrique et l’électronique. L’inflation pesant actuellement sur le pouvoir d’achat des consommateurs finaux risque cependant de ne pas permettre à la demande de ces secteurs de rebondir aussi franchement qu’habituellement au printemps.

En bref, cela signifie que les fournisseurs européens de polymères auront probablement du mal à trouver preneur pour leurs matériaux pendant une bonne partie de l’année 2023. Leurs coûts de production étant plus élevés que d’ordinaire, il leur faut préserver leurs marges et prévenir toute chute de prix trop importante.

Une telle entreprise est d’autant plus difficile que, contrairement à 2020 et 2021, les importations sont bien présentes sur le marché européen, à la différence qu’elles ne proviennent pas en majorité des Etats-Unis. L’allègement des mesures pour lutter contre la propagation du Covid a en effet permis de désengorger les ports européens, et donc de faciliter la distribution et la livraison des polymères importés.

Graphique : Evolution du cours du fret maritime pour un conteneur standard (40 pieds) en USD

Source : ChemOrbis

Evolution du cours du fret maritimie pour un conteneur standard en $

Le renforcement de la politique « Zéro-Covid » chinoise a, pour sa part, bouleversé le marché asiatique des polymères. C’est en effet toute une partie de l’industrie qui s’est arrêtée ou a fortement ralenti en Chine, et ce pendant de longs mois. Résultat : la demande chinoise de plastique a chuté, et les producteurs basés dans d’autres pays d’Asie ont dû trouver d’autres débouchés à l’export.

L’Europe s’est ainsi devenue une destination particulièrement attractive pour les lots produits en Asie, mais aussi au Moyen-Orient, du fait de ses hauts niveaux de prix. Si les prix du plastique ont baissé un peu partout dans le monde, ils se sont maintenus et demeurent très élevés en Europe. De quoi susciter l’appétit des traders, qui exportent en masse vers le vieux continent pour remédier à l’absence de l’ogre chinois.

En bref, les producteurs européens de polymères se retrouvent pris en étau entre une baisse a priori durable de la demande locale pour leurs produits, des concurrents internationaux proposant des matériaux à prix (parfois très) compétitifs et une hausse historique de leurs coûts de production. Le principal enjeu pour eux en 2023 pourrait donc être de mieux contrôler les volumes mis sur le marché par les acteurs locaux.

Un tel plan d’action pourrait leur permettre d’une part de limiter leur exposition aux variations des cours de l’énergie, mais également de rééquilibrer les marchés des polymères qui sont actuellement très longs (ie. : la demande est, dans la plupart des cas, nettement inférieure à l’offre en Europe). Rééquilibrer le marché européen des polymères, c’est aussi contrôler plus aisément les prix du plastique.

Quelles que soient les raisons derrière cette stratégie, force est de constater qu’elle est déjà adoptée en amont de la pétrochimie qu’au sein de cette dernière. D’après les données collectées par le service Performance économique de Polyvia, de nombreux sites européens de production de monomères ont réduit significativement leurs volumes de production au cours des derniers mois.

32 sites de production d’éthylène avaient ainsi réduit leurs volumes de production début décembre 2022. C’était également le cas de 31 sites européens de production de propylène, et de 14 sites européens de production de styrène. En somme, la chaîne de valeur des monomères en Europe réduit sensiblement la voilure depuis l’automne 2022, or ces substances sont indispensables à la fabrication de polymères.

A ces réductions de production s’ajoutent également de nombreux arrêts de production et, dans certains cas, des Forces Majeures. A noter toutefois que la demande des pétrochimistes européens continue de s’étioler, et les marchés de la plupart des monomères demeurent équilibrés en cette fin d’année.

Un comportement similaire semble avoir été adopté par les pétrochimistes européens. Certains d’entre eux ont effet revu leurs volumes de production à la baisse. Ainsi, 4 sites européens de production de PEBD-L avaient réduit la voilure début décembre 2022, contre seulement deux en octobre. 9 sites de production de PEBD ne produisaient plus à 100% de leurs capacités en décembre dernier, contre 3 en octobre. On comptait également 8 sites en réduction de production pour le PP début décembre 2022, contre 10 pour le PET et 15 pour le PVC. Ici aussi, les réductions de production ont lieu parallèlement à d’autres arrêts de production et Forces Majeures pour ces matériaux.

Les sites en situation de réduction de production sont moins nombreux pour les polymères techniques, mais il faut garder en tête que ces marchés sont bien plus concentrés que ceux des matériaux de commodité (PE, PP, PS, PVC…).

Le nombre de producteurs étant moins important, l’arrêt ou la réduction de production d’un site est théoriquement plus impactant que pour d’autres marchés.  On dénombrait ainsi 2 sites en réduction de production pour les PA 6 en décembre 2022, contre 3 sites pour le POM et 2 pour les PU.

Les organisations représentant la chimie et la pétrochimie en Europe ont parallèlement communiqué sur l’impact que la crise de l’énergie pourrait avoir sur l’activité de leurs membres, et plus précisément sur le maintien de cette dernière. Certains producteurs ont eux même communiqué sur sujet. C’est par exemple le cas de Dow Chemicals, qui a annoncé son intention de réduire sa production de PE dans le monde entier, et de Grupa Azoty pour la production de PA en Europe de l’Est. Tous les producteurs communiquant sur le sujet expliquent « attendre un retour à la normale de la demande » avant de relancer leur production.

Si les arrêts d’unité de production actuels n’ont pour le moment qu’un impact minimal, ils pourraient causer des problèmes au moment où la demande européenne de polymères rebondira. Les sites pétrochimiques sont, pour la grande majorité, anciens. Les redémarrages s’avèrent donc assez compliqués, comme on a pu le voir en 2020 et 2021, au moment où ces derniers ont dû reprendre leur activité une fois les confinements levés. Résultat : incendies, découvertes de fissures et pannes en séries… Et une nuée de Forces Majeures dont la plasturgie européenne se souvient encore, puisqu’elle a été accompagnée d’une véritable explosion des prix du plastique !

Pour résumer, le risque d’assister à de nouvelles pénuries grandira au fur et à mesure que les sites en réduction de production se feront plus nombreux.

Prévisions d’évolution pour les prix du plastique en 2023

Quelques précisions sur nos prévisions d’évolution de prix pour les plastiques en 2023

Les prévisions ci-après ont été construites au début du mois de décembre 2022, en tenant compte des éléments contextuels et de la réalité des différents marchés des polymères en Europe à cette période.

Ces prévisions ne tiennent pas compte d’éléments « imprévisibles », ou des facteurs de risques détaillés plus bas dans cet article. Nous considérons comme facteurs imprévisibles : les éventuelles Forces Majeures qui pourraient être déclarées en cas de difficultés de redémarrage des unités de production aujourd’hui arrêtées, ou encore une aggravation du conflit russo-ukrainien, une vague de froid majeure en Europe, ou une explosion de l’inflation.

Le service Performance économique de Polyvia tient toutefois compte de ces éléments imprévisibles dans le cadre de son étude du marché européen des polymères. Si toutefois ce sujet vous intéresse, nous vous invitons à vous rapprocher du service.

Le service Performance économique tente, à travers cet article, d’établir des prévisions crédibles pour 2023, bien que l’exercice pour l’année complète soit peu aisé. Comme évoqué plus tôt, cet article est donc susceptible d’être mis à jour en cours d’année pour tenir compte d’événements qui pourraient survenir au cours des prochains mois et changer la situation du marché européen des polymères.

Les prévisions que vous vous apprêtez à consulter sont le fruit d’une vision propre au service Performance économique. Il conviendra à chacun de les compléter avec les éléments dont il ou elle a connaissance. Nous vous invitons ainsi à ne pas entièrement baser vos stratégies d’achat de polymères sur ces prévisions.

Prévisions de prix pour le polyéthylène (PE) en 2023

L’étude à long-terme du marché européen du PE révèle que les prix du plastique se sont, au moins partiellement, décorrélés de l’évolution du cours de l’éthylène. Il est donc difficile de déterminer avec exactitude la direction que les prix emprunteront. Les fournisseurs européens de PE se sont notamment appuyés sur l’augmentation du cours de l’éthylène début novembre pour tenter d’obtenir des hausses de prix pour leurs matériaux. Tous n’ont pas réussi, loin de là.

  • La demande est ambivalente : certains segments tournent à plein régime alors que d’autres connaissent un ralentissement important. On observent en effet une hausse de la demande de films agricoles et de plaques PE, alors que les segments utilisant de l’EVA (films muticouches, tubes…) ont tendance à voir leur activité ralentir.
  • Certains segments de marché sont « captifs » de la production européenne car les donneurs d’ordre demandent à faire homologuer les grades utilisés par leurs sous-traitants. C’est souvent le cas de l’emballage pharmaceutique et agroalimentaire, par exemple. D’autres plasturgistes peuvent en revanche se permettre d’importer du PE depuis l’Asie car ils ne sont pas contraints par leurs clients.
  • Les réductions de production de PE sont de plus en plus nombreuses en Europe.

L’hiver 2023 devrait donc s’accompagner d’une pression baissière assez importante sur les prix du PE. La demande est en effet bien couverte par les volumes produits en Europe et ceux disponibles à l’importation.

Il sera toutefois très difficile pour les producteurs européens de continuer à pousser des hausses de prix pour le PE si la baisse des cours de l’électricité et du gaz naturel perdure au cours des prochains mois. L’enjeu sera alors de stabiliser les prix du matériau afin de préserver leurs marges.

La fin de la politique Zero-Covid en Asie laisse également entendre que les volumes importés depuis l’Asie risquent de diminuer à terme. Ce phénomène dépendra étroitement du rebond de la demande chinoise. Si celui-ci est fort, les volumes risquent de tarir rapidement. S’il est moins important qu’espéré, les traders asiatiques continueront à exporter du PE vers l’Europe.

Dans tous les cas, les prix européens du PE devraient se maintenir à un niveau assez élevé en 2023, et ce pour deux raisons. D’une part, les producteurs locaux vont faire en sorte de préserver leurs marges, quitte à amputer les volumes de production. D’autre part, une baisse trop rapide et trop importante des prix européens risque de dissuader les traders basés dans d’autres régions du monde, et donc de peser sur les volumes à l’import.

Prévisions de prix pour le polypropylène (PP) en 2023

Comme dans le cas du PE, les producteurs européens de PP ont tenté de profiter de la légère hausse du cours du propylène en novembre 2022 pour imposer des hausses de prix à leurs clients. Ces velléités d’augmentation ont toutefois été limitées par les volumes de PP importés, ces derniers étant proposés à prix compétitifs.

  • On observe une pression importante sur la production européenne de PP, avec de nombreux site à l’arrêt, ou qui produisent moins que d’ordinaire.
  • La production de PP n’est pas parmi les plus électro-intensives, mais de nombreux sites clés sont situés en Allemagne, où la rumeur veut que les pétrochimistes privilégient les achats spot d’électricité et de gaz naturel. Ce qui sous-entend que chaque hausse des cours de l’énergie est durement ressentie.
  • La demande de PP connait actuellement un fort ralentissement, et aucun redécollage significatif n’est attendu après les fêtes de fin d’année
  • Le retour des importations est synonyme de retour de la concurrence

La pression actuellement exercée sur l’offre est telle que les producteurs de PP n’auront d’autre choix que de baisser leurs prix, au moins au cours des premiers mois de l’hiver. Ils s’en tireront, au mieux, avec des rollovers.

Les importations devraient continuer à arriver sur le sol européen dès lors que les prix locaux du PP se maintiennent à un niveau plus élevé que ceux pratiqués en Asie et au Moyen-Orient. Les fournisseurs locaux seront donc encouragés à s’aligner sur leur concurrence.

Un possible redémarrage de la production industrielle au printemps ou à l’automne 2023 pourrait donner lieu à une stabilisation des prix. Une demande forte pourrait quant à elle ouvrir la voie à des hausses de prix, si tant est que la production européenne de PP n’ait pas redémarré d’ici là.

Ici aussi, une baisse trop importante des prix européens pourrait dissuader les importations de PP, et donc permettre aux producteurs locaux de mieux en contrôler les prix.

Prévisions de prix pour le polyéthylène téréphtalate (PET) en 2023

Les producteurs européens tentent actuellement de stabiliser le marché, et donc de maintenir les prix du PET, mais la demande n’est clairement pas au rendez-vous. Les fournisseurs européens sont en effet confrontés aux coûts élevés de leurs matières première et de l’énergie, ainsi qu’au retour des importations de PET.

  • L’offre est de plus en plus réduite, mais la demande est absente. Il n’y a pas d’issue en vue à cette situation à l’heure actuelle.
  • L’exercice de prévision des structures de coût devient de plus en plus difficile pour les producteurs de PET, les négociations pour les contrats sur le paraxylène se concluant de plus en plus tard dans le mois
  • Si les importations de PET sont là, elles sont néanmoins limitées. Les perspectives sont également mauvaises pour la demande sur le début d’année 2023, ce qui ne devrait pas encourager une augmentation des volumes à l’import.

La pression baissière sur les prix du PET est très importante et les producteurs ne contrôlent plus les marchés situés en amont de la chaîne de valeur du matériau. Il faut donc s’attendre à de nouvelles baisses de prix cet hiver, que les fournisseurs vont toutefois tenter de limiter.

Les quantités importées n’étant pas énormes, il convient de surveiller activement le niveau de l’offre européenne de PET pour en anticiper les mouvements de prix. Si les réductions de production se multiplient, les prix devraient se stabiliser, voire remonter un peu. Ce scenario est d’autant plus probable si l’hiver est froid.

Prévisions de prix pour le PVC en 2023

Le cours de l’éthylène ne suffit plus à lui seul pour déterminer les tendances de prix du PVC en Europe. Il faut également surveiller le niveau de la demande et la compétition à l’internationale.

  • Les négociations des contrats d’achat pour le PVC en 2023 se sont nettement complexifiées par rapport aux années précédentes.
  • Il n’y aura a priori pas de rebond de la demande PVC au cours de l’hiver, et un redémarrage fort de la demande pour ce polymère n’est également pas attendu au printemps et à l’été 2023, du fait des mauvaises perspectives du secteur du bâtiment. C’est donc une année 2023 en demi-teinte qui s’annonce sur ce front.

2023 devrait donc s’amorcer sur une tendance nettement baissière pour les prix du PVC, celle-ci étant soutenue par des volumes importés proposés à très bas prix. Dans la mesure où la consommation européenne de PVC ne devrait pas reprendre de sitôt, on peut anticiper un mouvement baissier sur l’année. Cela ne signifie pas pourtant autant que chaque mois verra survenir des baisses de prix à trois chiffres.

Les producteurs locaux cherchent en effet à limiter sensiblement les volumes qu’ils mettent sur le marché. Comme pour les autres matériaux, si les baisses de prix sont trop importantes, certains traders à l’import pourraient décider d’envoyer moins de volumes vers l’Europe. De quoi redonner la main aux fournisseurs européens.

Prévisions de prix pour le polystyrène (PS) en 2023

Quand le cours du styrène repart à la hausse, il a, ces derniers temps, tendance à le faire timidement et ces légères augmentations ne se ressentent pas sur les prix du PS, qui continuent à chuter depuis quelques mois. Ces baisses de prix successives s’expliquent avant tout pas celle des cours de l’énergie en Europe.

  • On observe donc une baisse de la part de l’énergie dans les coûts de production des fournisseurs européens de PS
  • La demande européenne de PS est très faible du fait du ralentissement économique général
  • Les plasturgistes transformant du PS ont cherché à se déstocker en fin d’année 2022
  • L’hiver est généralement la basse saison pour le PS et le PS-E

L’hiver 2023 devrait donc suivre la même tendance baissière que la fin d’année 2022 pour les prix du PS, mais les producteurs semblent anticiper un retour de l’activité en cours d’année, et donc de la demande. Ils ont en effet tenté de proposer des volumes supplémentaires dans le cadre des négociations sur les contrats d’achat de PS, selon les témoignages d’adhérents de Polyvia.

Il est donc possible que la tendance s’inverse dès le printemps 2023, dès lors qu’un restockage a bien lieu du côté des plasturgistes. Les prix du PS étant extrêmement sensibles aux événements géopolitiques, il semblerait également que les acheteurs du matériau soient exposés à une nouvelle année de montagnes russes.

Une chose est sûre : il y a peu de chances que les prix du PS ne retrouvent leur niveau d’avant la pandémie.

Prévisions de prix pour les polyuréthanes (PU) en 2023

La tendance haussière des prix des grades PU TDI a fini par se heurter à la faiblesse de la demande au cours de l’automne 2022. Les prix des grades PU MDI observent quant à eux une tendance baissière car le marché renoue avec les importations. On constate également que les producteurs européens cherchent à remplir leurs carnets de commandes.

  • Les importations de grades PU MDI depuis l’Asie tendent à annuler les effets de la hausse des cours européens du benzène. Les producteurs locaux cherchent à sécuriser les volumes à produire en 2023 en marge des négociations pour l’année à venir, et ce quitte à proposer des baisses de prix.
  • Les disponibilités pour les grades TDI demeurent toutefois limitées pour l’Europe sur la fin 2022, mais les volumes à l’import suffisent pour l’instant à couvrir les besoins exprimés par les plasturgistes.

Des secteurs clés de l’aval ralentissent franchement à la veille de la fin d’année. C’est par exemple le cas du bâtiment, mais aussi de l’électroménager. Les producteurs européens de PU, et en particulier ceux qui fabriquent des grades TDI, cherchent à réduire les volumes qu’ils produisent et à écouler leurs stocks.

En 2023, l’orientation des prix du PU dépendra étroitement de la continuité des importations. Si celles-ci venaient à diminuer, des hausses de prix seraient inévitables.

Prévisions de prix pour les polyamides (PA 6 et 6.6) en 2023

La Force Majeure déclarée en avril 2021 sur la production d’adiponitrile (ADN, un précurseur indispensable à la production de PA 6.6) du site de Butachimie à Chalampé est toujours d’actualité, mais cause moins de problèmes qu’au moment de sa survenue. Le montant des surcharges énergétiques appliqués aux prix du PA a tendance à baisser, et les importations viennent également tirer les prix européens vers le bas.

  • La demande européenne pour les PA 6 et PA 6.6 est particulièrement faible, et ce depuis plusieurs mois
  • Les réductions de production actuelles ne suffisent pas à rééquilibrer le marché
  • Des volumes produits en Asie arrivent désormais en Europe, et sont proposés à bon prix. Les volumes importés tendent toutefois à diminuer.

Les plasturgistes européens des secteurs de l’automobile, de l’électrique et de l’électronique ont cherché à se déstocker sur la fin d’année 2022, et il ne semble pas que leurs commandes vont reprendre franchement dès les premiers mois de 2023.

On se dirige donc vers une période de faiblesse de la demande et de l’offre, soit peu de changements en vue. Les marchés européens du PA 6 et du PA 6.6 devraient donc demeurer stables, tous comme les prix de ces plastiques, en tout cas en première partie de 2023.

La seule véritable source de hausses de prix pourrait être une forte augmentation des cours de l’électricité et du gaz naturel. Le tarissement des importations depuis l’Asie ne suffira pas, à lui seul, pour permettre aux producteurs d’imposer des hausses de prix pour les PA 6 et les PA 6.6.

Prévisions de prix pour l’ABS en 2023

Le déclin des précurseurs et monomères utilisés pour produire de l’ABS continue, dans un contexte de faible demande et de disponibilité des volumes à l’import.

  • L’offre européenne d’ABS est réduite, mais les volumes disponibles suffisent à couvrir les besoins de l’ensemble des plasturgistes européens.
  • Les importations continuent à arriver depuis l’Asie et tirent les prix vers le bas.
  • Une reprise des secteurs de la grande consommation et de l’automobile ne saurait être espérée pour le premier semestre 2023.

L’évolution de la météo constitue le seul risque immédiat pour le marché européen de l’ABS – ou en tout cas pour les industriels qui en achètent. Un hiver froid, en particulier en Allemagne, entraînerait probablement une explosion des coûts de production pour ce polymère, et donc des arrêts en séries.

Il faudrait néanmoins que ceux-ci soient très nombreux pour véritablement impacter le marché. Il est également probable que les fournisseurs asiatiques en profiter pour gagner des parts en Europe. On peut ainsi raisonnablement anticiper des baisses de prix de l’ABS à court-terme.

Prévisions de prix pour le polycarbonate (PC) en 2023

Il y a bien des tensions sur l’offre, mais les volumes produits sont pour l’instant suffisant pour honorer les quantités prévues par les contrats 2022. A voire s’il en sera de même pour 2023. La demande et l’offre étant au plus bas, on peut supposer que ce sera le cas.

  • Pas de rebond de la demande prévu cet hiver pour le PC en Europe
  • Des importations en provenance d’Asie sont proposées à des prix attractifs. C’est également le cas des grades ABS/PC.
  • Le cours du benzène devrait continuer à faire baisser les prix du PC en Europe.

Il faut toutefois anticiper une nette détérioration de l’offre européenne de PC au cours de l’hiver à venir, car certains producteurs ont déjà décidé de réduire la voilure. Les acheteurs de PC devraient toutefois pouvoir compter sur les importations pour compenser l’absence relative de leurs fournisseurs européens.

La récente chute des cours énergétiques laisse entendre que les prix du PC pourraient enregistrer de légères baisses au cours des mois à venir, dans la mesure où la crise de l’énergie ne s’aggrave pas. A noter que les producteurs européens vont toutefois tout faire pour équilibrer le marché, quitte à réduire significativement leurs volumes de production et à rompre des contrats.

Les principaux points de vigilance pour les acheteurs de polymères en 2023

Comme évoqué plus haut, plusieurs phénomènes et facteurs économiques pourraient impacter plus ou moins lourdement les marchés européens des polymères en 2023, et donc les tendances de prix du plastique pour l’année à venir.

Voici les éléments à surveiller de près identifiés par le service Performance économique de Polyvia :

  • L’évolution du conflit russo-ukrainien et son potentiel impact sur les cours de l’énergie, mais aussi sur la production de polymères techniques en Europe de l’Est.
  • Les annonces des producteurs quant à d’éventuels arrêts ou réduction de production en Europe, et ailleurs (Chine, Etats-Unis…).
  • Le déroulement de la saison des ouragans dans le Golfe du Mexique, et les éventuelles vagues de froid qui pourraient le traverser. Ces événements climatiques s’accompagnent généralement de nombreux arrêts de production de polymères, et les plasturgistes basés en Amérique du Nord pourraient se retrouver contraints d’aller chercher leurs matériaux ailleurs dans le monde pour remédier aux pénuries locales.
  • Les tendances de prix en Asie, pour l’instant baissières en raison du gel de l’économie chinoise. La politique « Zero-Covid » ayant pris fin, il est possible que la demande chinoise de polymères redémarre, et tire les prix vers le haut. Importer des volumes produits en Asie serait alors plus difficile pour l’Europe.
  • La reprise – ou non – des secteurs du bâtiment et l’électrique et électronique au printemps 2023
  • La crise de l’énergie en Chine, qui risque de provoquer des coupures d’électricité dans certaines provinces, et donc des arrêts de production de substances chimiques clés. Par exemple, les phosphores jaunes utilisés pour fabriquer des retardateurs de flammes utilisés en plasturgie.
  • L’évolution des marges de producteurs européens de polymères en général. Plus celles-ci seront réduites, plus le risque d’arrêt de production sera important.
Arnaud-Barbaza Bibiane - Chargée de mission économique

Bibiane Arnaud-Barbaza

Chargée de mission économique

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