Tribune : "Plastique : ne nous trompons pas de combat !"

11 juin 2025

Un monde sans plastique, un monde idéal ? Une illusion qui serait dommageable à l’environnement et à la santé. Qui imaginerait aujourd’hui des hôpitaux sans dispositifs médicaux stériles, des voitures sans composants allégeant leur poids et réduisant leur consommation, ou des emballages alimentaires garantissant la sécurité sanitaire sans plastique ? Nos ambitions les plus élevées – explorer l’espace, rendre la mobilité aux handicapés, protéger les aliments, transporter les vaccins – reposent sur ces matériaux. Plaider pour un retour à l’ère pré-plastique, c’est comme chercher à remonter le cours du temps : non seulement la bataille est perdue d’avance, mais elle détourne aussi des véritables enjeux et des solutions d’avenir dont notre société a besoin.

Les matériaux plastiques ont été, sont et demeureront toujours un formidable vecteur de progrès. De la santé à l’aéronautique, des transports à l’alimentation, ils ont permis des avancées majeures, sauvé des vies, démocratisé l’accès à des biens essentiels et rendu possible l’innovation dans tous les secteurs. Mais ce succès est aussi leur talon d’Achille : leur usage massif, parfois dévoyé, soulève à juste titre des préoccupations environnementales que plus personne ne peut minorer. Dépendance au pétrole, accumulation de déchets, risques liés à certaines substances chimiques : les charges retenues contre le plastique dans le débat public sont nombreuses. Pour autant, il serait vain de le réduire à un manichéen « stop ou encore », qui ne rend pas justice à la complexité du sujet.

Ainsi, l’enjeu n’est pas tant de faire disparaître le plastique que de transformer la filière pour répondre aux défis économiques, écologiques et sanitaires actuels. Imputer à la plasturgie l’ensemble des maux de la planète est un mauvais procès : en effet, la filière française et européenne se distingue par des règlementations parmi les plus strictes au monde, et les plus protectrices pour les citoyens et les consommateurs. Grâce à des textes structurants comme la directive sur les plastiques à usage unique, le règlement relatif aux pertes de granulés industriels ou encore le règlement REACH, l’Europe s’impose comme un moteur de la mutation mondiale de la plasturgie.

Dès lors, ne nous trompons pas d’ennemi : ce n’est pas le plastique en tant que tel qui pose problème, mais le plastique mal conçu, mal utilisé, mal recyclé, ou délibérément jeté dans l’espace public. Le vrai défi, ce sont nos modes de conception, de production et de consommation, la lutte contre le gaspillage et pour la durabilité, l’écoconception et la montée en gamme des produits, sans oublier l’éducation et le comportement civique des citoyens « consom’acteurs ». Privilégier la qualité, l’innovation, la circularité, c’est donner à la filière les moyens de devenir une filière d’avenir, créatrice d’emplois et de valeur sur notre territoire.

Sacrifier la filière de la plasturgie française et européenne, ce n’est pas la garantie d’une moindre pollution plastique mais bien l’assurance de délocaliser la production, d’importer des produits moins sûrs et moins circulaires, de perdre la maîtrise sanitaire et environnementale car les produits importés sont beaucoup plus émetteurs de gaz à effet de serre que ceux produits en Europe. Depuis 2021, l’Europe est devenue importatrice nette de produits manufacturés en plastique et, depuis 2022, de résines vierges. Du fait de la hausse massive des importations de matières extra-européennes, la production de plastiques recyclés en Europe a chuté en 2024 pour la première fois et le nombre d’usines de production de plastiques recyclés ayant fermé a doublé par rapport à l’année précédente. Ironiquement, pousser la lutte contre le plastique à son paroxysme risque d’obérer notre capacité à atteindre nos ambitions environnementales et répondre aux objectifs en matière de santé publique. Cette quadruple peine – disparition d’entreprises, perte de compétences, recul de la souveraineté et augmentation des émissions globales de gaz à effet de serre importés – ne fera aucun gagnant en France.

La transition écologique est un défi universel, mondial, qui exige la mobilisation de toutes les expertises. Pour réussir, ne nous privons pas du savoir-faire unique de la plasturgie française. Par l’ouverture d’un dialogue stratégique, à l’instar de ceux engagés avec l’industrie automobile et l’industrie métallurgique, donnons-lui les moyens d’innover, de se transformer, d’accompagner la société dans ses mutations. Car c’est ensemble, en conjuguant ambition environnementale, excellence industrielle et défense du bien commun, que nous construirons un avenir durable et plus sûr.

Pierre-Jean Leduc, président de Polyvia et président de DEMGY Group
Franck Dumasdelage, président du pôle Emballages de Polyvia, SIRAP France
Jérôme Empereur, président du pôle Médical de Polyvia et président de SGH Healthcaring
François-Xavier Lemasson, membre du pôle Automobile de Polyvia et directeur général d’EUROSTYLE SYSTEMS
Richard Marchant, président du pôle Bâtiment de Polyvia et directeur général d’ATLANTEM 
Sébastien Petithuguenin, président du pôle Recyclage de Polyvia et directeur général de PAPREC
Didier Müller, président du pôle Composites de Polyvia et responsable matières et stratégie partenariats de CLAYENS 

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À propos de Polyvia

Polyvia est le principal syndicat professionnel de l’industrie française de la plasturgie et des composites. La filière compte environ 4000 entreprises, soit plus de 210 000 salariés principalement issus de PME, pour un chiffre d’affaires de 76 milliards d’euros. Polyvia accompagne et soutient ses entreprises adhérentes dans toutes leurs problématiques économiques, industrielles, sociales et d’innovation. Nous les aidons à se transformer pour répondre aux enjeux technologiques, environnementaux, sanitaires et sociétaux. Notre organisation professionnelle œuvre aussi à la représentation et la promotion des intérêts des professionnels auprès des pouvoirs publics et à l’explication et la pédagogie de leurs métiers et de leurs atouts.

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